Économie et finances publiques : qui sauvera l'autre ?
Le couple économie - finances publiques est un grand classique des enseignements universitaires. Dans des temps plus anciens, on y décrivait les solides leviers que les pouvoirs publics trouvaient dans le budget et la fiscalité pour réguler l'économie, dans la ligne des théories keynésiennes et des pratiques d'un État interventionniste. Ce modèle, qui a produit de remarquables résultats, s'est défait sous l'effet de profondes transformations intervenues au dernier tiers du XXe siècle.
Le début des années 1970 vit les chocs pétroliers, la fin du système monétaire de Bretton-Woods (abandon du rattachement des monnaies à l'or, taux de change flottants), l'internationalisation des économies avec de puissants effets de vases communicants. Dans les années 1980, l'établissement du marché unique et la libre circulation des capitaux firent démanteler la plupart des instruments de l'interventionnisme public. À partir de 1992, l'Union économique et monétaire et l'euro ont entraîné des bouleversements systémiques considérables : perte du pouvoir monétaire des États, impossibilité des « dévaluations compétitives » qui réduisaient la charge de la dette et compensaient les écarts de coûts de production, absence de prise sur les taux d'intérêt, obligation de compétitivité et d'innovation, discipline inédite des finances publiques.
Le fonctionnement de l'économie est de ce fait devenu plus conforme aux logiques de marché et les fondateurs de l'UEM prévoyaient que celle-ci allait ouvrir une ère de stabilité (monnaie, prix) et de croissance soutenue. L'histoire fut différente. Les crises se sont enchaînées, les règles n'ont pas été respectées et la BCE a dû inventer des instruments non conventionnels et gérer l'extravagance des taux zéro.
Le phénomène le plus paradoxal est l'évolution divergente entre l'économie marchande qui a connu une croissance modeste assortie de désindustrialisation et l'économie non marchande qui a pris une place dominante : dépenses publiques à 57 % du PIB et prélèvements obligatoires autour de 45 % du PIB, néanmoins insuffisants et complétés par un recours massif à l'emprunt. Les dépenses sociales, près de la moitié des dépenses publiques, organisent une économie administrée dans et de laquelle vit une part importante de la population. Évoluant selon des logiques propres, peu flexible et difficilement maîtrisable, la sphère sociale, essentiellement redistributrice, peut servir d'amortisseur de chocs économiques, mais non de moteur pour créer de la richesse nationale.
Le grossissement des finances publiques est ainsi devenu le problème majeur auquel les gouvernants cherchent fébrilement des solutions en leur sein même, avec en référence les normes du droit communautaire.
Or, on ne règlera pas les problèmes de finances publiques par la seule manipulation des impôts et des dépenses. Elles doivent pouvoir trouver de nouvelles forces dans l'économie. L'unique voie vertueuse, et la moins douloureuse, est une croissance robuste qui générera des recettes et réduira des charges publiques. Voilà qui devrait être la priorité des priorités, en y incluant une vigoureuse politique environnementale. Au lieu de cela, les forces politiques préfèrent s'agiter dans de stériles stratégies partisanes.
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