La Lettre du Financier Territorial

Editorial

Instruction M57 : Le grand basculement est effectif !

Publié dans le N°395 -Février 2024
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Les collectivités territoriales et leurs groupements devaient passer sous le régime de l'Instruction budgétaire et comptable M57 à compter du 1er janvier 2024 qui organise la présentation et le fonctionnement des budgets et des comptes des collectivités et de leurs groupements. Les instructions M14, M52 ou encore M71 disparaissent au profit d'une nouvelle nomenclature largement modernisée. Ce grand basculement a presqu'eu lieu puisque quelques communes (moins de 5 %) n'ont pas encore adopté le nouveau référentiel financier. Elles auront jusqu'au 1er janvier 2025 pour le faire. Une version allégée des nouvelles obligations a été mise en oeuvre pour les petites communes. Cela n'a pas suffi à faire rentrer tout le monde dans le nouveau modèle.

Cette réforme n'est évidemment pas neutre et n'est pas limitée à des questions de présentation budgétaire ou comptable. Elle est justifiée par plusieurs raisons. La M57 est, aux dires du Gouvernement, ce qui se fait de mieux en termes de qualité comptable ! Elle est marquée par un net rapprochement des règles comptables publiques locales avec celles de la comptabilité privée.

Le passage à la M57 n'est pas qu'un changement de nomenclature, mais une rénovation en profondeur des pratiques financières des entités concernées.

Ainsi, par exemple, toutes les collectivités de plus de 3500 habitants, dont beaucoup n'en disposaient pas, ont dû se doter d'un règlement budgétaire et financier qui les a obligées à s'approprier la réforme. Car ce dernier n'est pas un simple guide de procédures internes. Il doit notamment préciser les modalités de gestion des autorisations de programme (AP) et d'engagement (AE) et des crédits de paiement. Sont tout particulièrement visées les règles relatives à l'annulation de ces AP et des AE. Le règlement budgétaire et financier doit indiquer les modalités d'information de l'assemblée délibérante sur la gestion des engagements pluriannuels au cours de l'exercice. La pluriannualité doit ainsi devenir une véritable obligation de la gestion locale ce qui pour les moyennes et petites collectivités n'était souvent pas le cas.

La mise en oeuvre de la M57 n'est pas sans inconvénients pour les collectivités et en particulier pour les plus petites d'entre elles comme le montre la première année de pratique. Ainsi, la disparition des dépenses imprévues n'a pas été anticipée par certaines collectivités. De même, il faut désormais une délibération autorisant l'exécutif local à opérer des virements entre chapitres à hauteur maximale de 7,5 % hors chapitre concernant les dépenses de personnel. Certaines communes n'ont pas voté en temps et en heures ces délibérations. Il reste beaucoup d'innovations à s'approprier.

Si les éditeurs de logiciels financiers ont anticipé la réforme, la formation des agents n'a pas toujours suivi. Le passage en M57 pour certaines collectivités dès le 1er janvier 2023 a permis de montrer tout l'intérêt de la création, en 2020, des conseillers aux décideurs locaux créés avec le plan de rénovation du réseau de proximité et la mise en oeuvre des services de gestion comptable de la DGFIP. Ces conseillers ont été fortement sollicités pour répondre aux questions des élus et des agents des collectivités lors de cette bascule.

La bascule en M57 devrait à terme être suivie par la mise en oeuvre du Compte financier unique (CFU) créé par la loi de finances pour 2019. A terme, les comptes de gestion et les comptes administratifs seraient fusionnés. La réforme visant à instituer le CFU ne devrait pas remettre en cause la séparation des ordonnateurs et des comptables mais y porte un aménagement conséquent dans un cadre rénové issu du nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics introduit par l'ordonnance du 23 mars 2022.

Le CFU doit servir de base à la certification des comptes. Cette dernière a été très récemment appelée de ses voeux par la Cour des comptes mais le Gouvernement ne semble pas disposé à imposer cette réforme. Il préconise de réserver la certification aux collectivités territoriales les plus importantes sur une base facultative et surtout volontaire. La certification obligatoire n'est donc pas pour demain ! Dès lors quel serait l'intérêt de mettre en oeuvre un compte financier unique ? La question est posée...

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