La Lettre du Financier Territorial

Editorial

Verdissez, verdissez, il en restera toujours quelque chose !

Publié dans le N°399 -Juin 2024
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Les préoccupations environnementales et la lutte contre le changement climatique sont devenues un aspect majeur de la gestion publique locale. Dès lors, les finances locales sont l'objet d'efforts de « verdissement ». La construction d'un budget local devrait être un moment de réflexion permettant d'orienter les dépenses vers la transition écologique. Pour l'État, l'établissement d'un « budget vert » est une obligation en vertu de la loi de finances pour 2020. Depuis le 1er janvier 2024, les communes de plus de 3 500 habitants, leurs groupements mais aussi les établissements publics locaux de plus de 3 500 habitants, la métropole de Lyon, la collectivité de Corse, la collectivité territoriale de Martinique et celle de Guyane, doivent produire une annexe spécifique au compte administratif ou au compte financier unique intitulée « Impact du budget pour la transition écologique ». Cette mesure, un peu précipitée, issue d'amendements parlementaires est applicable dès 2024 alors même que les textes d'application prévus pour préciser les formes de cette annexe n'étaient pas encore parus et que nombre de collectivités avaient déjà adopté leurs comptes administratifs.

Cette nouvelle obligation ne concerne que les dépenses d'investissement. Un jour prochain, sans doute, les dépenses de fonctionnement seront, elles aussi, visées par cette obligation d'information. Cette annexe verte est complétée par une information facultative sur ce que certains ont pu appeler une annexe « dette verte ». Cette dernière, également annexée au compte administratif ou au compte financier doit permettre aux collectivités qui choisissent de la publier d'identifier la dette qui finance leurs investissements verts. Ces annexes, pour être utiles devraient permettre de quantifier les efforts d'investissement verts.

Cependant, on reste dans une démarche rétrospective. Il serait utile, comme le préconise notamment l'OCDE, que tout le processus budgétaire soit inscrit dans la démarche de transition écologique. Il reste, cependant, à améliorer les processus comptables permettant de mieux isoler ces dépenses vertes, ce qui ne sera pas simple ! Il est, en effet, nécessaire d'aboutir à la construction d'un véritable outil de pilotage et non à une simple comptabilité verte.

Le verdissement passe aussi par les concours financiers de l'État. C'est notamment le cas du Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires appelé plus communément « fonds vert » destiné à accélérer la transition écologique. La loi de finances pour 2024 a souhaité amplifier le verdissement des projets financés par les dotations d'investissement. En 2023, les dotations de soutien à l'investissement local avaient été intégrées dans le budget vert de l'État, avec un objectif de financement de projets concourant à la transition écologique à hauteur de 25 % (porté à 30 % en 2024) des enveloppes des dotations. Dans la même perspective d'autres dotations sont désormais soumises à cet impératif de verdissement des projets financés. 25 % des projets soutenus par la dotation de soutien à l'investissement des départements et 20 % des projets soutenus par la dotation d'équipement des territoires ruraux devront aussi s'inscrire dans une démarche de transition écologique. Il sera difficile de distinguer clairement les investissements visant à remédier véritablement au changement climatique de ceux qui mettent en oeuvre des moyens compatibles avec ce dernier.

Il n'est pas inintéressant d'obliger les élus à réfléchir à l'impact de leurs projets d'investissement sur l'environnement. Ces derniers ont souvent une vision plus directe des enjeux environnementaux locaux mais sont, cependant, soumis à des contingences contradictoires notamment de développement économique ou touristique. On en voudra pour preuve, par exemple, la construction de l'autoroute A 69 en Occitanie. Développement local contre préoccupation écologique tel est le cruel dilemme auquel sont soumis ces mêmes élus. Ils ne sont, d'ailleurs, pas toujours aidés par l'État qui a donné des signes contradictoires en réduisant un certain nombre de crédits verts dans son décret du 21 février 2024 d'annulation de crédits.

On l'aura compris, malgré tout, le mouvement de verdissement des budgets locaux est irréversible.

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